Editorial
Une vision de Van
Comment Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus
recevait ses colis de souffrances
Chemin de Croix
Lettres au frère André
Prions avec le frère Marcel Van
"Je garde secrète la blessure de mon coeur"
Editorial
Comme vous avez pu le remarquer dans les précédents numéros de ce bulletin, nous avons publié des témoignages qui montrent que Van est présent dans les petites choses de la vie quotidienne comme dans les grands événements et les choix de vie¼ avec sa discrétion et son efficacité, avec sa douceur et sa fermeté¼ respectant notre liberté pour mieux nous entraîner sur le chemin de l’amour plus fort que la mort, parce que " l’amour ne peut mourir ".
Nous recueillons tous les témoignages que vous voudrez bien nous envoyer et qui pourraient être utiles pour la Cause. Cependant, bien que nous vous proposions certains d’entre eux, dans ce bulletin, le procès informatif en vue de la béatification de Van étant toujours en cours, ces témoignages n’engagent que leurs auteurs.
Ce numéro nous fait entrer dans le grand mystère de la souffrance, que Van a découvert et vécu tout au long de sa vie. Il est articulé autour d’un Chemin de Croix réalisé à partir des paroles de Van par une moniale de l’abbaye bénédictine Sainte-Marie des Deux-Montagnes, au Québec. Nous la remercions très vivement de son initiative en espérant qu’elle en suscitera d’autres. La présentation que nous avons faite vous permettra de réaliser un fascicule indépendant plus commode à conserver et à transporter.
" En un instant mon âme a été entièrement transformée. Je n’avais plus peur de la souffrance
¼ Dieu m’a confié une mission : celle de changer la souffrance en bonheur ¼ Puisant sa force dans l’Amour, ma vie ne sera plus désormais que source de bonheur "
Aut.439
Anne de Blaÿ
Une vision de Van
Mon Père, ce jour-là, (fête du Christ Roi) je vis Jésus assis un peu courbé et le visage triste, avec des écouteurs appliqués aux oreilles ; puis des voix se firent entendre dans les langues de divers pays, même du Vietnam, comme je l’ai raconté plus haut. Quand vint le tour de la France, Jésus parla très longtemps, de sorte que j’ai tout oublié et que j’étais incapable de me rappeler quoique ce soit. Ce n’est que le jour où vous m’avez demandé de prier pour la France, que cela m’est revenu à la mémoire, et que Jésus me l’a rappelé en me demandant de vous en parler...
Mon Père, quand les voix cessèrent, Jésus m’a aussi parlé. Il était toujours assis, la tête penchée en avant, une main soutenant son menton et l’autre posée sur sa poitrine, et il avait l’air préoccupé. J’entendis soudain en français une voix d’homme qui s’adressait à lui sur un ton très injurieux (c’est tout ce que j’ai pu comprendre). A ce moment-là, la Sainte Vierge était aussi présente, ne cessant de regarder Jésus d’un air bien triste. J’entendis ensuite, venant d’un autre côté, une voix parlant également français et qui consolait Jésus. Mais cette voix très faible était entièrement couverte par la voix injurieuse.
Je vis encore quantité de gros colis qui étaient retournés à l’expéditeur ; ils portaient ces mots : "Colis de souffrances que personne n’a acceptés." Et la Sainte Vierge devait entasser tous ces colis sans discontinuer. Je vis ensuite que Jésus se tournait du côté d’où arrivaient des paroles d’amour... puis peu à peu arrivèrent aussi des fleurs, puis les paroles injurieuses adressées à Jésus diminuèrent insensiblement. Quant aux fleurs, Jésus les prit et les expédia quelque part, de sorte que je ne les ai pas revues. J’ai encore entendu d’autres voix nombreuses dont la douceur faisait oublier à Jésus sa tristesse, comme il m’en a parlé lui-même plus haut. Les colis de souffrances, la Sainte Vierge les a tous expédiés... Et les paroles d’amour devenaient de plus en plus nombreuses et claires. Des voix que j’entendais, la plupart venaient de petites âmes qui répétaient surtout des paroles du genre de celles-ci (il se peut que je me trompe en les écrivant) : "O Jésus, embrasse-moi ! O Jésus, je t’aime". A chacune de ces paroles, Jésus laissait voir une très grande joie ; et de ses lèvres s’échappait un rayon lumineux qui se dirigeait vers l’endroit d’où partaient ces paroles. Il y eut même une voix qui demanda s’il restait encore des souffrances, et s’offrait à les endurer à la place de Jésus. (Vu que ces phrases étaient trop longues, je les ai comprises, mais je ne peux pas les écrire). Alors la Sainte Vierge prit un colis et l’expédia dans la direction d’où venait la demande.
Cette vision a duré environ dix minutes. Jusque là, Jésus ne m’avait pas encore parlé de la France ; mais l’autre jour, quand vous m’avez conseillé de prier pour la France, Jésus m’a rappelé ce qu’il m’avait dit et m’a demandé de vous raconter ce qui précède.
Col 19-20
C’est le jour du Christ-Roi que Van a cette vision. Il comprend et nous fait comprendre combien la royauté de Jésus est méconnue des hommes. Dans ses écouteurs, Jésus écoute les échos du monde, il cherche aussi à se faire entendre, sans grands résultats; comme s’il n’intéressait pas les siens, ceux pour qui il donne sa vie.
Aujourd’hui encore, les injures du monde sont si fortes qu’elles rejoignent Jésus à travers tant de médias qui se font l’écho de bien des horreurs, du mépris et du mensonge, et vont jusqu’au Père plein d’amour pour nous. Cependant, la petite voix faible consolant son Seigneur va bientôt devenir multitude, à l’image du petit reste d’Israël (Is. 10, 20).
Les fleurs qui arrivent sont, selon l’enseignement de Thérèse de Lisieux, toutes les petites choses faites par amour et offertes à Jésus. Fleurs que Jésus ne garde pas pour lui mais qu’il expédie "quelque part", certainement vers les terres sans fleurs que sont les âmes des sans-Dieu, des sans-espoir, des misérables, afin qu’elles découvrent la signification vraie de l’Amour.
Quant aux colis de souffrances, écoutons Sainte Thérèse nous expliquer elle-même ce qu’ils sont : l’acceptation et l’offrande de tout ce qui nous advient de pénible, par amour pour Jésus et pour le salut du monde.
Comment Sainte Thérèse de l'Efant-Jésus recevait ses colis de souffrances
La pratique de la charité ne m’a pas toujours été si douce, je vous le disais à l’instant, ma Mère chérie ; pour vous le prouver, je vais vous raconter certains petits combats qui certainement vous feront sourire. Longtemps, à l’oraison du soir, je fus placée devant une sœur qui avait une drôle de manie, et je pense... beaucoup de lumières, car elle se servait rarement d’un livre. Voici comment je m’en apercevais : Aussitôt que cette sœur était arrivée, elle se mettait à faire un étrange petit bruit qui ressemblait à celui qu’on ferait en frottant deux coquillages l’un contre l’autre. Il n’y avait que moi qui m’en apercevais, car j’ai l’oreille extrêmement fine (un peu trop parfois). Vous dire, ma Mère, combien ce petit bruit me fatiguait, c’est chose impossible : j’avais grande envie de tourner la tête et de regarder la coupable qui, bien sûr, ne s’apercevait pas de son tic, c’était l’unique moyen de l’éclairer ; mais au fond du cœur je sentais qu’il valait mieux souffrir cela pour l’amour du bon Dieu et pour ne pas faire de la peine à la sœur. Je restais donc tranquille, j’essayais de m’unir au bon Dieu, d’oublier le petit bruit... tout était inutile, je sentais la sueur qui m’inondait et j’étais obligée de faire simplement une oraison de souffrance, mais tout en souffrant, je cherchais le moyen de le faire non pas avec agacement, mais avec Joie et paix, au moins dans l’intime de l’âme. Alors je tâchais d’aimer le petit bruit si désagréable ; au lieu d’essayer de ne pas l’entendre (chose impossible) je mettais mon attention à le bien écouter, comme s’il eût été un ravissant concert et toute mon oraison (qui n’était pas celle de quiétude) se passait à offrir ce concert à Jésus.
Une autre fois, j’étais au lavage devant une sœur qui me lançait de l’eau sale à la figure à chaque fois qu’elle soulevait les mouchoirs sur son banc ; mon premier mouvement fut de me reculer en m’essuyant la figure, afin de montrer à la sœur qui m’aspergeait qu’elle me rendrait service en se tenant tranquille, mais aussitôt je pensai que j’étais bien sotte de refuser des trésors qui m’étaient donnés si généreusement et je me gardai bien de faire paraître mon combat. Je fis tous mes efforts pour désirer de recevoir beaucoup d’eau sale, de sorte qu’à la fin j’avais vraiment pris goût à ce nouveau genre d’aspersion et je me promis de revenir une autre fois à cette heureuse place où l’on recevait tant de trésors.
Mère bien-aimée, vous voyez que je suis une très petite âme qui ne peut offrir au bon Dieu que de très petites choses, encore m’arrive-t-il souvent de laisser échapper de ces petits sacrifices qui donnent tant de paix à l’âme ; cela ne me décourage pas, je supporte d’avoir un peu moins de paix et je tâche d’être plus vigilante une autre fois. Ah ! le Seigneur est si bon pour moi qu’il m’est impossible de le craindre, toujours Il m’a donné ce que j’ai désiré ou plutôt Il m’a fait désirer ce qu’Il voulait me donner...
Manuscrit C, Folio 31
Mais ce n’est pas tout, il est même possible d’offrir au Seigneur les souffrances dues à nos fautes, à nos péchés :
Sœur Agnès : Je lui confiais mes pensées de tristesse et de découragement après une faute.
... Vous ne faites pas comme moi. Quand j'ai commis une faute qui me rend triste, je sais bien que cette tristesse est la conséquence de mon infidélité. Mais, croyez-vous que j'en reste là ? ! Oh ! non, pas si sotte ! Je m'empresse de dire au bon Dieu : Mon Dieu, je sais que ce sentiment de tristesse, je l'ai mérité, mais laissez-moi vous l'offrir tout de même, comme une épreuve que vous m'envoyez par amour. Je regrette mon péché, mais je suis contente d'avoir cette souffrance à vous offrir.
Carnet Jaune, parole 2
Ce qui ne dispense pas, bien sûr, d’aller demander pardon à Jésus dans ce magnifique sacrement : la confession, celles de nos péchés, mais plus encore celle de l’Amour miséricordieux du Père qui nous recrée.
Afin de méditer avec Van les mystères de la passion de Notre Seigneur, voici un chemin de croix. Une façon efficace de se préparer à accueillir les "colis de souffrance", et d’offrir nos souffrances en communion avec celles de Jésus pour la rédemption du monde.
Lettres au frère André
+
J.M.T.
Le 8 août 1948.
Cher Frère André,
J’avais promis de vous écrire une longue lettre pour vous consoler un peu de votre tristesse. Hélas, cher Frère, j’ai actuellement à traverser une longue étape douloureuse. Je pense qu’il n’existe pas une souffrance sur terre que le bon Dieu ne m’oblige à endurer. J’accepte cela de très bon cœur, et parce que ma joie est loin d’être parfaite, je vous demande de vous réjouir avec moi, et de remercier Jésus pour moi, car c’est lui-même, dans son amour qui a bien voulu me faire partager sa croix.
Mon Frère, je n’ai pas encore eu la possibilité de tenir ma promesse ; aussi, veuillez m’excuser et prier pour moi, comme vous le feriez pour votre petit frère accablé de souffrances. Oui, priez pour moi, car je ne suis qu’un petit enfant bien faible.
Cependant, je vais soupirer vers le Seigneur comme le rameur au milieu des ténèbres de la tempête, et lui demander de pénétrer les sentiments de mon cœur.
O mon Dieu, le Bien-Aimé de mon cœur, même si je dois encore
lutter sur terre, même si je dois encore marcher sur une route semée d’épines et être accablé de longues souffrances, jamais je ne cesse de mettre ma confiance en toi.
Même si ma vie est sevrée de toute jouissance, Seigneur, je mets en toi toute ma joie ; je considère la souffrance comme un sourire.
Même si toute ma vie s’écoule dans la tristesse, même si la douleur enveloppe mon cœur, jamais je ne me lasserai d’aimer, toujours je m’accrocherai à l’ancre de l’espérance, et cela, fermement et pour toujours, jusqu’au moment où je parviendrai au séjour de la paix...
Cher petit Seigneur de mon cœur, reçois ma souffrance comme un sourire... puisque ma vie n’est que souffrance, et que l’amour est l’unique besoin de mon cœur.
Cher Frère André, je vous demande maintenant de prier pour moi, afin que je puisse vivre joyeux et en paix dans l’union d’amour avec Jésus.
Priez aussi pour ma famille et surtout pour mon cher papa.
Cher Frère André, c’est grâce au Père Dumas qui a manqué son avion, que j’ai l’occasion de vous expédier ma lettre. Sans cela, je n’aurais absolument aucun espoir de vous la faire parvenir.
Je vous dis au revoir, et je vous donne un baiser avec les lèvres du cher petit Seigneur de mon cœur.
Réjouissez-vous avec moi des difficultés que je rencontre présentement.
Votre petit frère éloigné,
J. M. T. Marcel,
C. Ss. R.
+
J.M.J.T.A.
Le 2 mars 1949.
Mon cher Frère André,
J’ai entendu dire que les Frères Jean et Jacques se rendront à Haiphong, attendre le bateau qui partira pour Saigon. Ayant un peu de temps, je profite de l’occasion pour vous écrire quelques mots. Mon Frère, nous sommes déjà en carême, et je n’avais pas l’intention de vous écrire ; cependant, vu que depuis longtemps, mon travail m’a empêché de vous écrire, vu qu’au Têt j’ai été malade au lit, j’attendais une occasion. Dans la suite, Jésus m’a choyé à l’excès, m’envoyant de la pluie tous les jours de lavage. Même si la température était fraîche, c’était vraiment pénible, car je devais mettre une semaine pour faire le lavage, alors que j’aurais pu le faire en une journée, s’il avait fait soleil.
Il semble que Jésus a beaucoup soif de mes larmes. Mais cette fois, j’ai fait preuve d’audace ; malgré toutes les épreuves me venant de lui, mes yeux sont restés secs. C’est à peine si une fois ou l’autre seulement j’ai versé quelques petites gouttes de pluie printanière.
Mais qu’en est-il de vous, Frère André ? Vous devez avoir actuellement tellement de travail que vous oubliez de pleurer, n’est-ce pas ?
Je vois que Jésus se conduit avec nous comme un "Petit rusé". Il nous laisse d’abord pleurer à satiété, puis il nous surcharge de travail au point qu’il ne nous reste plus de temps pour nous montrer exigeants, et alors il peut dormir en paix !...
Nous sommes entrés en carême. Tenons-nous discrètement à côté de la Croix. Notre Bien-Aimé est là, le visage contracté, tant il a soif des larmes d’amour de notre cœur. Approchons-nous de lui pour apaiser sa soif ; puisons dans notre cœur les larmes de la tristesse, pour lui donner à boire. Offrons de bon cœur nos souffrances pour consoler notre Divin Ami accablé de tristesse, à la vue de tant d’âmes qui cherchent leur jouissance dans un monceau de péchés, etc.
Cher Frère, je m’arrête ici. Veuillez accepter de bon cœur mes paroles sincères, et qu’elles soient pour nous un stimulant à aimer encore davantage celui qui nous a tant aimés. Priez pour votre petit Marcel...
Je ne sais si cette année... ? Je n’ai encore rien de précis
Veuillez prier pour moi, prier beaucoup, pour demander à Jésus de ne pas m’abandonner... N’est-ce pas, mon Frère ?
Enfin, permettez que je vous donne un baiser avec les lèvres du petit Jésus.
J. M. T. Marcel, C. Ss. R.
Prions avec le frère Marcel Van
"Je garde secrète la blessure de mon coeur"
-1-
Mon frère, je ne te parle pas de cette blessure,
Par crainte de jeter le trouble dans ton cœur.
Je n’ai pas le courage de le faire,
En risquant par là de provoquer ta pitié.
-2-
Déjà, j’ai partagé avec toi les douceurs,
Je t’en prie, laisse-moi l’amertume.
Malgré la souffrance, malgré la tristesse,
Laisse-moi me débrouiller en paix.
-3-
O mon frère, ne me force pas,
Car si je ne bois pas l’amertume,
La souffrance ne pénétrera pas mon cœur,
Et je ne pourrai comprendre l’ardeur de l’amour.
-4-
Peu importe la blessure de mon cœur.
Elle finira par se cicatriser.
J’ai pitié de ceux qui jour et nuit
Portent dans leur âme la souillure du péché.
-5-
Et ce n’est pas tout ; il y a encore la foule
De ceux qui pleurent dans la nuit loin de toi.
Et combien d’autres qui ont renié l’Evangile.
Comment me résigner à cette amère réalité ?
-6-
Reste en paix mon frère, tu n’as pas à te troubler !
Je prends plaisir à rester joyeux quand je ne le suis pas.
Et pour quelle raison ai-je à souffrir en silence ?
Parce que la souffrance est enfouie dans mon cœur.
-7-
Mon frère, je ne te parle pas de cette blessure
Par crainte de jeter le trouble dans ton cœur.
Je t’aime d’un amour débordant.
Ma tristesse n’est rien d’autre qu’une joie silencieuse...
Un soir de solitude pour mon âme, un jour du mois de mars 1951
J.M.T. Marcel, C.Ss.R
Il y a un amour qui se traduit en paroles tristes : TUI YEU
Il y a aussi un amour qui garde secrets les sentiments de l’âme.
Che vet thuong tam : La blessure secrète de mon cœur.
Ce bulletin est distribué gratuitement. Ceux qui le désirent peuvent aider par leur générosité et leurs dons l’édition et la diffusion de cette publication ainsi que la réalisation des activités apostoliques conduites également par "
Les Amis de Van".
Directeur de la publication : Anne de Blaÿ
Tous les versements doivent être établis au nom de :
Les Amis de Van
35, rue Alain Chartier
75015 Paris
FRANCE
Tél : 01 48 56 22 88
Fax : 01 45 30 14 57
e-mail : amisdevan@noos.fr